L’expression de l’auto-suffisance, ainsi que sa quête sont très « tendance » actuellement. Ce terme, issu du vocabulaire géopolitique et qui d’un point de vue philosophique fait référence au
culte de l’autarcie, est un indicateur psycho-social intéressant permettant de définir certains glissements.
Quel est l’impact de « l’aura » de ce terme au niveau psychologique ? Quelles formes de refuge peuvent représenter la revendication de l’auto-suffisance ou de sa recherche en tant que
quête ?
Au niveau psychologique, l’auto-suffisance peut être un masque et aussi une forme de sublimation qui apportent à l’ego un refuge ou un embellissement dans la relation qu’il a au réel et à sa part
d’inconnu. Celui-ci devient alors plus « maniable » , moins phobique : les thèmes contemporains alimentent la quête d’autosuffisance. Ce sont,
- La peur de la vie géopolitique et de l’avenir,
- La peur de ne pas se sentir rattaché à un groupe social qui pense « comme soi",
- La peur de la médecine et le rejet de son autorité,
- La peur de l’avenir induisant le souhait de ne plus faire d’enfants,
- La peur de tout ce qui ne semble pas naturel, biologique ou conforme à une idéologie.
La liste pourrait être longue et la vie des réseaux sociaux sont là pour alimenter directement ces peurs. Le trait commun à toutes ces pulsions qui sont en quête d’auto-suffisance est de
partir du réel et de le nourrir d’anxiété. Comment l’ego peut-il alors se projeter dans l’avenir si il s’emprisonne idéologiquement dans une situation de fermeture ? Cela pose aussi la
question des parents et de ce qu’ils peuvent transmettent comme messages contraignants à leur enfants.
Quelques repères. La vitalité de la vie psychique et de l'ego se construisent grâce à un échange permanent avec l’interaction sociale. L’être humain est avant tout un être social. Ce sont
les fruits de ses interactions, humaines, psychologiques, culturelles et économiques qui ont fait avancer les civilisations…. et c’est le même flux pour l’équilibre de la personnalité. Les
sociétés qui sont devenues autoritaires ne sont-elles pas aussi celles qui se sont définies comme auto-suffisantes. Les personnalités les plus complexes ou perverses revendiquent aussi le
refuge du quant-à-soi.
Derrière la requête et l’utilisation du prisme de l’auto-suffisance, se cache donc un sophisme. C’est à dire que sous l’apparence vertueuse d’une idéologie, se cachent une imprévisibilité
latente et la perversion des moteurs essentiels de la vie sociale qui sont : le partage, la tolérance, l’ouverture, l’acceptation de l’altérité. De ce point de vue, l’affirmation de la quête de
l’autosuffisance, peut s’apparenter à une forme de manipulation mentale, car elle n'est pas étayée par des données réalistes.
Alors à quoi sert le flux de l’auto-suffisance ? Les personnes les plus anxieuses et en manque d’estime d’elles-mêmes sont naturellement attirées par des idéologies de fermeture au monde du réel,
car elles ont une fonction d’apaisement et de régulation face à ce qui fait peur. Elles se protègent ainsi en se fermant et s’autosécurisant. Mais l’anxiété reste refoulée. L’ego est toujours en
souffrance.
Une solution : il est possible d’éclairer sa lanterne en substituant le mot auto-suffisance par un vocabulaire plus nuancé et adapté et surtout moins psychorigide. On peut
par exemple parler de la quête d’autonomie, qui peut agir pour s’épanouir d’un point de vue matériel ou moral par rapport à son éducation. Également, reconnaitre en soi le goût de l’indépendance
qui peut œuvrer au niveau de plusieurs domaines de notre personnalité ( intellectuel, sentimental, émotionnel, culturel, artistique). Nous voyons ici que ces termes définissent une personnalité
respirante et sont porteurs de plus de nuances au niveau du travail personnel. Ils représentent une ouverture et une créativité.
La vie sentimentale a t-elle sa place sur les réseaux ?
La solitude sentimentale, le célibat prolongé ont toujours été des recherches qui peuvent parfois s’apparenter à une recherche initiatique. Cette étape de vie est régulièrement accompagnée en
psychothérapie. Au cour de ce parcours spécifique à notre situation humaine, est venue se greffer la fonction très pratique et particulière des réseaux de rencontres.
Suite à une période régulière de l’usage de ces réseaux, de nouvelles situations psychologiques apparaissent. Ce qui frappe dans l’évaluation des situations de ces nouveaux célibataires, c’est le
décrochement avec une forme de sincérité, une difficulté à s’abandonner et une forme d’indifférence au niveau des sentiments. Le sentiment amoureux s’est protégé et il s’en trouve anesthésié.
Souvent ces personnes ne savent plus ce qu’elles recherchent exactement. Des cicatrices morales, liées à la surabondance des interactions, ont déformées le sens profond de leurs besoins
d’intimité. La quête de l’amour est un abandon à l’autre qui fait peur. Il il y a souvent une confusion entre l’affectivité sincère et les pulsions dictées par cette peur.
En réalité, que l’on le veuille ou non, il est compliqué de sortir indemne de ce type d’exploration relationnelle. Elle laisse des traces. Cela peut s’expliquer par des critères psychologiques et
grâce à la connaissance de la personnalité. Mais ils sont aussi grandement induits par l’essence même des facteurs structurels et fonctionnels des réseaux :
Les facteurs structurels :
- Lorsque l’on utilise un outil de communication virtuel, l’on est nécessairement dépassé par les lois de l’outil de communication ( le référencement des annonces n’a rien à voir avec la valeur
réelle des personnes). Le niveau de sincérité des autres n’est pas palpable ( dans le monde virtuel, tout est fantasmé ou interprété).
- L’animation des algorithmes des réseaux est calqué sur le modèle de sites de marchandises. La relation humaine est-elle une marchandise ? Taille, poids, critères de beauté etc ? Faut-il
remplir un panier pour rencontrer l’âme sœur ? C’est un sujet de réflexion en soi.
Les facteurs fonctionnels :
- Un paradoxe psychologique apparaît. Il est clivant : les sites dédiés aux contacts donnent la possibilité de rencontrer dans l’intimité beaucoup de personnes, mais c’est comme si la
reconnaissance de ce que l'on est n’opérait pas : c’est virtuel. On s’en sort très seul ou isolé. Ce cycle est animé par les systèmes numériques pour apporter toujours de nouvelles
consultations. Il est établi que le nombre de rencontres peut aller bien au de la de 50 personnes. C’est addictif.
- La quête sentimentale peut rarement aboutir à un enrichissement personnel au niveau de l’intimité. Lorsque l'on recherche l’âme soeur, il s’agit bien d’un abandon et de se sentir intime avec
l’autre. Or, via les réseaux, rien n’est intime : c’est l’essence de ce système. Ce procédé de communication peut apporter des perturbation clivantes auprès des personnalités fragiles, surtout si
il n’est pas conforme au départ à leurs valeurs ou si elles sont endeuillées par une séparation.
- Enfin, lorsqu’une belle rencontre peut s’établir, elle sera rapidement entachée par le flux de la jalousie. En effet, lorsque deux êtres sont réellement amoureux et engagé dans une relation
durable, les fantômes des expériences démultipliées peuvent briser une belle aventure. Souvent une personne du binôme reste en contact avec son réseau. Des conflits naissent, des souffrances sont
fortes et tout cela pour « des relations qui n’étaient pas importantes ». Parfois, on préfèrera saboter une relation saine, car un sentiment de honte ressurgit.
Les solutions de la thérapie pour renouer avec l'intime :
- La pratique psychothérapeutique offre des ressources pour comprendre et analyser une étape de célibat. C’est le lieu idéal pour évoquer l’intime. Si vous êtes seul-e, l’origine vient-elle de
l’éducation, d’un traumatisme, d’un choc sentimental, d’une vision trop magique du couple ? Beaucoup de critères sont possibles et uniques à chacun. En les étudiant on ouvre une voie affective,
un lâcher-prise pour une rencontre authentique avec soi, avant d’aller à l’autre. La thérapie est un combat pour être heureux, se sentir conscient et exister, prêt à l’accueil de l’autre. C’est
ce travail d’éveil qui permet de ne pas renouveler toujours les mêmes échecs sentimentaux.
- On peut rester réfractaire à cette analyse tout en restant attaché à cette réalité. Dans la vie rien n’est magique, la solitude ou l’errance sentimentale ne sont pas le fruit du hasard. Il
n’y a rien à perdre à tenter de comprendre son origine.
- Enfin, la rencontre amoureuse suppose un abandon total de son être pour l’autre : un lâcher-prise au flux de la vie et de l’amour qui la porte. A contrario, la quête obsédante de l’autre via
les réseaux n’est pas une ouverture, c’est un contrôle, voire une forme d’égoïsme : on se fait plaisir, celui de l’autre n’a pas toujours réellement de place. Nous voyons bien ici que ces
deux dynamiques sont antagonistes.
Les bénéfices du travail à domicile serait-il un miroir aux alouettes ?
"Le télétravail augmenterait l’efficacité professionnelle". Les analyses de presse fusent en ce sens. Même si ces effets d’annonces sont toujours à relativiser, ils me permettent de mettre à plat
un constat de réalité. De nouvelles formes d’accompagnements thérapeutiques seront à envisager prochainement. Trois situations interpellent déjà, car elles
délitent dès à présent des repères liés cette fois-ci, à l’équilibre de notre personnalité.
Des dysfonctionnement évalués au niveau des personnes et non de la rentabilité des entreprises :
Qu'apportent exactement le travail à domicile ? Outre l'intérêt sanitaire flagrant et obligatoire, la question d'une prolongation en dehors de la crise sanitaire est-elle vraiment adapté à notre
mode de culture latine qui aime le contact ? Les conséquences probables du fonctionnement induit par le télétravail offre plusieurs lectures : sanitaire, économique, politique... Voici une
suggestion de réflexion qui ouvre le débat au niveau de la part d'humanité qui veille en nous. Quels sont les diagnostics déjà évalués en dehors des informations officielles au cœur des
consultations psychologiques ? Que se passe t-il réellement autour de la vitalité de la relation professionnelle ?
- Dans le fonctionnement apporté par le travail à domicile, les personnes effacées ou timides s’en sortent bien. Elles peuvent voir dans ce système une façon de se protéger et d’éviter
les agressions naturelles et obligatoires du monde professionnel. Vivre ensemble « à distance » ne remplacera pas l’enjeu du contact humain réel : faire et décider ensemble,
négocier, apprendre les bonnes ou mauvaises nouvelles, affirmer un point de vue… Cet avantage est relatif, car du point de vue de la dynamisation psychique, ces personnalités auront augmenté une
forme d’inadaptation dans le cadre d’une reprise active normale. De nouvelles formes de souffrance au travail verront le jour : celles d’avoir tiré avantage d’un isolement. Pour ces
personnes qui sont des parents, cet isolement est pervers, car leurs enfants, tout comme tous leurs proches en contact avec des liens sociaux pendant la crise (école, travail), sont susceptibles
d'être perçus comme intrusifs.
- Les règles de vie au travail présentiel, lorsqu’elles sont posées et respectées sont bienfaitrices et fournissent une réelle émulation du collectif. Nous ne pouvons pas expérimenter cette
source émotionnelle en travaillant à distance et même perdre l’habitude de ce bon sens : faire ensemble dans le respect de certaines règles qui contribuent à un bien-être au travail et une
image de l’entreprise agréable. Cette stimulation de la personnalité est nécessaire à notre équilibre psychique, tout comme à celui de la vie de l'entreprise. Le retrait comportemental du
télétravail aura donc des conséquences identitaires à deux niveaux, pour les salariés et la dynamique humaine des entreprises elles-même.
- À l'occasion de séquences de Coaching professionnel réalisées en dehors de cette crise, on constate que le malaise au travail peut être aisément apaisé par des modifications simples que ne
sont plus transposables à domicile. Ce sont par exemple : les entrées intempestives dans les bureaux, le bruit de discussions inadaptées, la porte d’un bureau que l’on n’ose fermer pour ne
pas vexer, les consultations des mails privés… La liste est longue et ces accumulations et la gestion de ces détails font référence souvent plus au bon sens qu’à une désorganisation interne.
Ces « détails » de la vie professionnelle apportent une fatigue qui va augmenter la susceptibilité et réduire l’attention. Il est donc logique le la forme du télétravail apporte une
part de confort et d’efficacité. Mais le retrait des interactions empêchent précisément cette progression de savoir-vivre ensemble. Les règles de vie au travail présentiel, lorsqu’elles sont
posées et respectées sont bienfaitrices et fournissent une réelle émulation du collectif. Nous ne pouvons pas expérimenter cette source émotionnelle en travaillant à distance et même perdre
l’habitude de ce bon sens : faire ensemble dans le respect de certaines règles qui contribuent à un bien-être au travail et une image de l’entreprise agréable.
- Les interactions verbales ou frontales, les habitudes de vie au travail permettent également de s’évaluer en se comparant à la pratique de l’autre. Il n’y a là rien de toxique, puisque nous
avançons par, avec et au détriment de nos relations et de la présence des collègues. La forme induite par le travail à distance rejette cette dynamique. Si l’on n’est pas suffisamment attentif,
on peut aisément devenir autosuffisant, refuser la critique et ne plus accepter le regard de l’autre ou toute forme de supervision. Or, c’est par ce jeu relationnel du présentiel qu’il est
possible de progresser personnellement tout comme de faire avancer les projets d’entreprise. Il est difficile d’évaluer ses compétences professionnelles (actives ou inhibées), ses réelles
performances, car pour cela nous avons besoin d’une personne extérieure : de se comparer à l'autre. Les jeux relationnels au travail favorisent la progression professionnelle in situ et aussi
lors de recherches d’emploi : moments clé où l'on va être évalué par l'autre.
• C’est en comparant ses propres
performances professionnelles à celles des autres que
nous pouvons réellement identifier notre efficacité et pertinence.
Savoir si nous sommes efficaces et utiles pour les autres au travail.
Les ressources du coaching professionnel sont utiles, car elles favorisent le regard extérieur.
Vous encadrez des équipes, pourquoi ne pas vous donner du temps pour réfléchir ensemble
aux facteurs humains et à la réparation post-crise ? Pensez à me solliciter !
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